Forum 2004 – Extraits marquants


  • Le cinéaste documentariste se fait tour à tour cueilleur, conservateur, interprète, passeur et conteur – mais demeure avant tout un créateur. Comment donc former un créateur? Comment apprendre à regarder, à saisir des moments de la vie en respectant le rythme de la vie elle-même? Comment préparer quelqu’un à avoir quelque chose à dire?
  • L’outil de base du documentariste est la formation intellectuelle: «On doit lui donner les outils intellectuels pour qu’il puisse forger une interprétation crédible, solide, et la transmettre comme une vérité.» Une formation en sciences humaines comme la sociologie et les sciences politiques sont autant d’outils nécessaires à la prise de parole. Le deuxième est la maîtrise du langage cinématographique. «Le cinéaste du réel va sans cesse à la rencontre de l’Autre. Il doit disposer des instruments pour entrer en communication et tirer de cet Autre ce qu’il peut enseigner au monde.» (Michel Venne)
  • L’idée de professionnalisation semble non pertinente à plusieurs, il n’y a pas adéquation automatique entre le désir de faire des films et la possibilité de gagner sa vie, loin de là.
  • Pour plusieurs intervenants, la formation débute avec le repérage des désirs, de la passion, de la flamme, du feu sacré et l’entretien de cette passion. On doit enseigner l’écoute, on reconnaît l’importance de l’écriture comme moment de réflexion.
  • Plusieurs parlent de transmission des connaissances en opposition à l‘enseignement, mais l’enseignement est aussi une forme de transmission. On ne peut pas enseigner le documentaire comme on enseigne les mathématiques – c’est une forme d’art et il reviendrait aux écoles d’art d’en assurer la formation.
  • L’acquisition de l’expérience sur le terrain – apprendre en faisant, en écoutant, en observant – est ressortie comme un des éléments clé de la formation du documentariste. C’est par le partage de l’expérience qu’on pourrait transmettre les rudiments du métier, notamment par l’usage du «compagnonnage» ou du «mentorat». D’où la question de comment organiser ce mentorat.
  • Parmi les suggestions de forme de mentorat, mentionnons la création d’une Académie du documentaire (sur le modèle des académies de peinture), la création de mutuelles, un centre de ressources pour cinéastes, l’organisation d’ateliers sur mesure, de séminaires, de rencontres de découvertes (cinéastes et œuvres); la création d’un poste de «cinéaste en formation» dans le budget de production d’un documentaire. En ce qui concerne la production, la création de programmes de formation de producteurs en entreprise est de plus en plus urgente.
  • Il y a une forte résistance à l’institutionnalisation de la formation.
  • Le cinéma documentaire se trouve quelque part entre l’architecture et la poésie. Le documentaire est une forme d’expression poétique, en ligne avec la tradition orale des conteurs d’histoires. Il faut résister à la tyrannie de ceux qui obligent les cinéastes à écrire avant de tourner un documentaire.
  • La grille de classification des compétences a suscité beaucoup de scepticisme – surtout parce que la passion en était absente. Une question demeure cependant: on a beau considérer que le désir est le point de départ de toute création documentaire, il faut apprendre à faire des films. De là le besoin d’une certaine forme d’institutionnalisation.
  • En ce qui concerne le renversement de la pyramide d’origine réalisateurs-producteurs-radiodiffuseurs évoqué par certains intervenants, on désire la ramener à son origine. Il a d’ailleurs été question en ce sens de l’éducation à faire auprès des directeurs de la programmation dans les chaînes de télévision.
  • Il faut penser à la création d’une chaîne internationale du documentaire à la manière de «CNN», chaîne qui pourrait être diffusée dans internet et créer de nouveaux modes de distribution pour le documentaire, comme par exemple un réseau de salles numériques, à l’instar de CinemaNetEurope.
  • Le mot de la fin revient à Jean-Daniel Lafond, Président de l’Observatoire du documentaire, qui s’inquiète de la situation des documentaristes de création dont le sort est entre les mains d’un système de financement qui ne leur est pas toujours favorable.
  • En ce qui concerne le thème de la journée, il considère que la table est mise pour aller plus loin et préparer des propositions pour les institutions; il faudra au préalable pousser la réflexion un peu plus loin.