Mémoire remis au groupe de travail sur le cinéma québécois

L’Observatoire du documentaire, fondé en 2003 sous l’égide des Rencontres internationales du documentaire de Montréal (RIDM), regroupe les principales associations audiovisuelles professionnelles, ainsi que les institutions, diffuseurs et distributeurs concernés par le documentaire, au Québec et au Canada qui le financent.

Il se veut un lieu de réflexion, de rassemblement et de dialogue afin d’assurer au documentaire sa place essentielle sur toutes les plateformes de diffusion.

L’Observatoire veille à ce que le documentaire assume pleinement son rôle fondamental dans la défense de la démocratie, de la tolérance et de l’ouverture au monde.

Il favorise la prise de parole et le débat public, suscités par les œuvres documentaires qui traitent des enjeux, des rêves et des valeurs de la société.

Il travaille à l’amélioration des conditions de création, de production et de diffusion du documentaire.

Les membres de l’Observatoire siégeant tous au conseil d’administration et les membres

  • Alliance des arts médiatiques indépendants (AAMI)
  • Alliance des producteurs francophones du Canada (APFC)
  • Association des producteurs de film et de télévision du Québec (APFTQ)
  • Association québécoise des techniciens de l’image et du son (AQTIS)
  • Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec (ARRQ)
  • Chaînes ASTRAL/Astral Media (Canal D)
  • Documentaristes du Canada (DOC)
  • Front des réalisateurs indépendants du Canada (FRIC)
  • Guilde canadienne des réalisateurs (GCR)
  • L’institut national de l’image et du son (L’inis)
  • Office national du film du Canada/National Film Board of Canada (ONF/NFB)
  • Rencontres internationales du documentaire de Montréal (RIDM)
  • Société des Auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTeC)
  • Télé-Québec (TQ)
  • Vidéographe

Les membres du conseil d’administration de l’Observatoire se réunissent une fois par mois afin de partager leurs réflexions sur les dossiers importants qui concernent la production et la diffusion du documentaire, entreprendre des études et décider d’actions à mener. L’Observatoire prend position publiquement et organise une fois par année une rencontre de tous les acteurs du milieu documentaire: le Forum — événement qui reçoit l’appui de nombreux partenaires du milieu.

Aidé par des organismes tels le Fonds des médias du Canada, la SODEC, et Téléfilm, l’Observatoire ont publié dans les récentes années un Guide des financements complémentaires pour le documentaire ainsi qu’Étude sur le documentaire et les plateformes numériques.

Déclaration

Mise à jour d’un texte rédigé en 2006, plus pertinent que jamais.

  1. Contexte. Nous vivons à une époque marquée par des turbulences extrêmes, qu’elles soient géopolitiques, économiques, sociales, écologiques ou culturelles. Le travail des cinéastes documentaristes qui nous apportent le fruit de leur réflexion sur le monde nous permet de mieux comprendre les réalités qui nous entourent et d’élever le niveau de notre réflexion critique tout en favorisant notre ouverture envers l’Autre. Les documentaristes contribuent à créer un espace de liberté essentiel à la vie démocratique.
  2. Prestige. Le documentaire est le genre cinématographique qui a fait la réputation du Canada à l’étranger depuis l’avènement du cinéma direct au début des années soixante. Les nombreux prix gagnés à travers le monde par des films produits par l’Office national du film du Canada et par les cinéastes et producteurs indépendants confirment la reconnaissance internationale du documentaire canadien et contribuent à la renommée du pays.
  3. Vision d’ensemble. Pour assurer sa survie et son développement, la situation du documentaire doit être analysée dans une perspective globale et holistique afin que tous les éléments qui concourent à son succès se développent en harmonie.
  4. Création-production. Le financement de la production est l’élément clé d’une cinématographie documentaire de qualité. Il permet aux cinéastes d’apporter le temps et le soin nécessaires à la qualité des œuvres. Dans cet esprit, le documentaire a besoin d’institutions fortes qui disposent d’enveloppes adéquates et de financement à long terme.
  5. Diffusion-Télévision. Ce précieux apport à la vie démocratique que constitue le documentaire doit être accessible à l’ensemble de la population. Une présence grandissante et valorisée du documentaire d’auteur à la télévision est non seulement souhaitable mais prioritaire. Les chaînes de télévision publiques nationales, de même que les télévisions éducatives, doivent pouvoir compter sur des enveloppes stables et substantielles. Dans l’ensemble, le secteur télévisuel privé doit faire une place grandissante au documentaire.
  6. Distribution. L’Observatoire s’intéresse aux récentes expériences de distribution et d’autodistribution du documentaire en salle, une étude est entreprise en ce sens et fera l’objet d’une discussion au prochain Forum à l’automne 2013. La création d’un réseau de salles ouvertes à la diffusion du documentaire permettra l’accès au public de toutes les régions à la cinématographie documentaire.
    Autre élément de l’étude sur la distribution entreprise par l’Observatoire: L’internet et les nouvelles plateformes qui deviennent un réseau de distribution de plus en plus intéressant pour le documentaire. L’Observatoire s’intéresse aux divers projets de Portail pour rendre accessible la production documentaire au grand public. Ces nouvelles avenues de distribution nécessitent par ailleurs que l’on apporte une réponse adéquate à la question de la protection des droits d’auteur et de la rétribution équitable des ayants droit.
  7. Formation des cinéastes. Le nombre de programmes de formation des documentaristes est en augmentation. Cependant la formation continue qui permet aux cinéastes de se maintenir à jour, particulièrement dans le domaine des nouvelles technologies de production et de diffusion, doit faire l’objet d’une approche concertée et d’une offre diversifiée.
  8. Développement des auditoires. Les festivals (RIDM, Hot Docs) et autres évènements de diffusion font connaitre et aimer le documentaire à de nouveaux publics; ils sont donc une étape essentielle du parcours des œuvres. Par ailleurs, afin d’avoir une connaissance adéquate de la culture contemporaine, il faut s’assurer que le milieu de l’éducation enseigne aux enfants à décoder le langage audiovisuel et que les adolescents soient initiés à une culture cinématographique ouverte sur le monde et attentive à leur propre univers.

La situation actuelle

La production documentaire au Canada a connu une baisse de 100 millions depuis 2008-09, en 2010-11 457 projets ont été produits comparativement à 591 projets en 2008-09. En ce qui concerne la production francophone au pays, alors que sa télédiffusion a connu une légère hausse de 3%, le volume total affiche une baisse de 12%. Les licences accordées par les télédiffuseurs privés francophones étant en baisse de 28%. (Chiffres de Doc Canada).

Le milieu du documentaire a été très touché par les coupures dans la culture de la part du gouvernement fédéral. La disparition du Fonds canadien du Film et de la Vidéo indépendante, les coupures à Téléfilm, Radio-Canada et l’ONF résultent dans une difficulté accrue à financer la production documentaire au Québec, surtout quand on parle de documentaires uniques puisque les télédiffuseurs qui sont la clé du déclenchement du financement d’une majorité de documentaires cherchent de plus en plus à attirer l’auditoire par la diffusion de séries ou encore d’émissions de téléréalité que certains cherchent à faire reconnaitre par les organismes de financement comme du documentaire.

Que ce soit pour des questions budgétaires ou pour des questions de stratégie de programmation, les cases horaires consacrées au documentaire se font de plus en plus rares chez nos télédiffuseurs — peu de rendez-vous réguliers offerts aux téléspectateurs, une promotion inadéquate.

Les salles de cinéma sont réticentes à diffuser des documentaires alors que des expériences très intéressantes tant au pays qu’à l’étranger tendent à prouver l’intérêt des spectateurs à se déplacer pour aller voir des documentaires en salle surtout quand les films sont accompagnés par les créateurs ou des intervenants dans le film.

Paradoxalement, malgré les difficultés grandissantes à financer les films, il se produit bon an mal an plus d’une quarantaine de longs métrages documentaires au Québec — ce chiffre faisant référence uniquement aux films ayant tenu l’affiche au moins une semaine en salle. Symptôme de cet engouement des créateurs et d’un certain public pour le genre: la présence accrue des documentaires dans les médias. Les journalistes s’intéressent plus que jamais aux documentaires et les cinéastes sont invités plus que jamais à commenter leurs œuvres.

Tout comme le cinéma de fiction, notre cinéma documentaire rayonne à travers le monde et se mérite de nombreux prix dans les grands évènements internationaux.

Pistes de solutions

  • Assurer le financement adéquat de la SODEC pour lui permettre de consolider le financement du documentaire — et tout particulièrement du documentaire indépendant de la télédiffusion;
  • Assurer le financement adéquat de Télé-Québec pour lui permettre de participer de façon adéquate à la production de films documentaires reflétant la réalité du pays et l’ouverture sur le monde de nos cinéastes;
  • Créer un fonds incitatif à la diffusion du documentaire en salles;
  • Créer à la SODEC un fonds pour la promotion des documentaires accessible aux producteurs;
  • Créer un fonds dédié à l’autodistribution des documentaires par les producteurs seuls ou en association avec des distributeurs

Carmen Garcia, présidente