Philippe Baylaucq
Nous voici dans un période un peu curieuse pour le documentaire. Beaucoup de choses vont bien et on constate pourtant qu’il est fragile.
Aujourd’hui, il s’agit presque d’états généraux, puisque beaucoup de sujets seront couverts. On aimerait, avec Jean-Pierre Gariépy, Directeur de l’Observatoire du documentaire, ressortir d’ici avec des solutions. Il y a des gens venus du Canada et de l’étranger pour partager leurs nombreuses perspectives.
Nous allons commencer avec un tour d’horizon de ce qui se passe au Québec en documentaire, avec Marie Brazeau et Alain Rondeau de la Sodec.
Marie-Brazeau
Déléguée aux relations d’affaire à la SODEC
Je vais vous présenter un portrait d’ensemble du documentaire au Québec. Ces chiffres proviennent de l’aide fiscale et donnent un portrait de l’ensemble de la production au Québec.
On voit que le volume total est en croissance, et a quintuplé depuis 10 ans. Les budgets moyens ont aussi doublé. En 1996, le volume total de production représentait 26 millions de dollars, alors qu’en 2006, c’était 128 millions de dollars, le volume a donc quintuplé, ou presque. On a aussi les données du crédit d’impôt, qui sont passées de 4,4 millions en 1996 à 19 millions en 2006, ce qui est aussi une croissance importante. Les budgets moyens ont pratiquement doublés, passant de 400 à 700 000$. Le deuxième tableau, c’est la répartition du volume d’affaire par formats, donc émissions uniques ou moyen-métrages, longs métrages, mini-séries et séries, sur une période de trois ans. Le volume global sur trois ans est de 123 million de dollars, et c’est réparti comme suit, 42% pour les séries, 23 % pour les mini-séries, 2% les longs-métrages et 23% ce qu’on appelle les émissions uniques, moi je dirais les moyens-métrages. Si on regarde de plus près, par formats de production, sur les trois dernières années par rapport au nombres pour les émissions uniques, on est passé de 94 productions en 2004 à 104 productions en 2006, pour une progression de 10%. Pour le volume de production, toujours des émissions uniques, ça a progressé davantage, on est passé d’un volume de 37,2 millions à 49,3 millions, progression d’à peu près 32%. Le coût moyen de production est passé de 395 000$ à 474 000$, donc, 20%. Les longs métrages, c’est le contraire qui s’est passé, en 2004 on a produit 6 longs métrages alors qu’en 2006 il ne s’en est produit que trois. Diminution de 50%.
Le volume de production a aussi diminué, passant de 2,1 million à 1,4 millions. Le budget moyen lui, a augmenté, est passé de 362 000 à 481 000$. On voit ici que le budget moyen est particulièrement élevé en 2005 par rapport aux deux autres années, c’est probablement parce qu’un documentaire en imax a été produit cette année-là. Les mini-séries et les séries ont été mises ensemble. Globalement, le nombre de productions a diminué, mais le volume de production a augmenté pour les mini-séries de 25%, même si le nombre a diminué, et les séries, le volume a diminué un petit peu, de 2%. 2005 est une années significative pour les séries, avec un volume de production de 59 millions. Les budgets moyens ont beaucoup augmenté pour les mini-séries, de 92%, et pour les séries d’a peu près 10%.
Passons aux chiffres de l’aide sélective, programme géré par la direction du cinéma de la SODEC.
C’est un portrait du nombre de projets déposés, versus le nombre de projets acceptés, pour les trois dernières années, par programmes. Donc globalement le nombre de dépôts est assez stable. Au programme Jeunes Créateurs, les dépôts en production ont baissé, passant de 60 en 2004 à 43 en 2006.
Alain Rondeau
Je suis à l’admission des projets, et aux Jeunes créateurs on a remarqué une baisse des dépôt effectivement, qui peut peut-être s’expliquer par les frais de gestion imposés depuis peu au dépôt des projets. Je sais pas si c’est vraiment ce qui explique ce phénomène, aux Jeunes créateurs c’est 50$ par projet… J’ai du mal à croire que c’est ce qui empêche les gens de déposer des projets, mais on a remarqué une diminution du nombre de projets déposés. Cette année, au mois de septembre, on a eu l’un des plus petits dépôt en production, depuis trois ans. Par contre le volume de demande en scénarisation est toujours aussi élevé et augmente régulièrement avec les années et là, il n’y a pas de frais de dépôt. Alors je sais pas si il y a des gens qui basent leur carrière sur un frais de 50$, mais…voilà.
Marie Brazeau
Par rapport au nombre de projets acceptés, c’est resté sensiblement la même chose, mais il y a encore une différence aux Jeunes créateurs, où le nombre de projets acceptés en production a diminué, passé de 12 à 7 projets.
Alain Rondeau
Cette diminution de projets acceptés est due au fait que les gens demandent maintenant toujours le maximum de l’aide possible, les devis ont augmenté de beaucoup, on peut donc aider moins de projets. Nos budgets à nous n’ont pas augmenté.
Marie Brazeau
En scénarisation, au programme régulier, le taux d’acceptation de projets est passé de 79% en 2004 à 53% en 2006. En production de 49 à 43%, donc légère diminution. Au programme des Jeunes créateurs, le taux d’acceptation est resté sensiblement le même en scénarisation et est passé de 20% à 16% en production.
Alain Rondeau
Si je peux me permettre une autre parenthèse, aux Jeunes créateurs le documentaire est la minorité des projets. Le 3/4 des projets qu’on reçoit, c’est de la fiction. Une anecdote: je n’ai aucune idée de ce que ça veut dire, mais il y a des années où les projets documentaires ont tous été déposés par des femmes, alors que les dépôts en fiction sont fait par des hommes.
Marie Brazeau
Par programme, pour la dernière année, je vais compléter par quelques chiffres. L’année dernière on a accepté 54 projets en scénarisation, avec une moyenne par projet de 10 800$. En production, il y a eu 43 projets, pour une moyenne de 51 800$. Au Jeunes créateurs, en scénarisation, 19 projets, moyennes de 6 200$ par projet et en production, 7 projets, pour une moyenne d’investissement de 44 200$.
L’évolution des structures financières pour le trois dernières années se présente ainsi: La Sodec a un apport constant, entre 2,6% et 2,9%, le Fonds canadien et Téléfilm, incluant le programme pilote pour les long métrage et le mini-traité, ont augmenté leur apport de 30%. L’ONF a augmenté ses apports du simple au double, le crédit d’impôt fédéral a augmenté de 22% et le crédit d’impôt provincial de près de 29%. Les autres apports combinés, alors là j’ai compilé les apports publics et privés, CALQ, CAC, Rogers, le FCFVI, c’est une augmentation assez importante du simple au triple. Les investissements des producteurs ont diminué, eux, de 30%, les apports des diffuseurs ont augmenté de 7%, les apports des distributeurs ont diminué de 31% et les apports en co-production ont diminué aussi, de façon significative, autour de 42%.
Pour la première fois, nous sommes en mesure de vus présenter un portrait des documentaires par formats, sur trois ans, donc les émissions uniques, les séries, les mini-séries et les longs métrages. L’apport global de la SODEC est de 4% pour les émissions uniques et de 4 % du volume de production. J’ai mis les autres par ordre décroissant, donc en premier viennent l’ensemble des crédits d’impôt, donc 23% du volume, les diffuseurs 17%, le Fonds canadien 16%, les autres apports publics et privés 14%, les apports qui viennent des co-producteurs en co-production 11%, les distributeurs 8%, les producteurs 4%, l’ONF 2%.
Pour les longs-métrages, la SODEC est à 7% du volume de production, et par ordre décroissant, les co-producteurs 28%, les autres apports 19%, les crédits d’impôt à 16%, l’investissement des producteurs à 10%, les distributeurs 9%, l’ONF est à 5%, les diffuseurs 4%, Téléfilm 1% et un apport de 0% du Fonds canadien.
Les mini-séries, la SODEC est à 1%, la co-production en premier lieu à 27%, les diffuseurs 23%, les crédits d’impôt 19%, le Fonds canadien 15%, distributeurs 8%, les autres apports 4%.
Finalement pour les séries les premiers investisseurs sont les diffuseurs à 34%, le crédit d’impôt 23%, le Fonds canadien 16%, co-producteurs 14%, distributeurs 7%, les autres apports 3%, producteurs 2%, l’ONF 0%.
J’aimerais terminer en parlant des co-production pour lesquels on a constaté une baisse importante en 2006-2007. En 2005 il y en avait 28 et en 2006 il y en avait 9. Diminution de 67% donc beaucoup. Sur l’ensemble des productions québécoises il y a 73% de production 100% québécoises et 27% de co-production.
Benjamin Hogues
Je représente informellement les bénéficiaires du programme Jeunes Créateurs de la Sodec. On constate un manque aberrant de financement. Un projet sur dix est accepté. Je fais circuler une lettre adressée à la ministre afin d’obtenir plus d’argent pour le programme. J’invite les gens à signer cette pétition.
Lucette Lupien
On a beaucoup de chiffres, c’est formidable. Dans l’ensemble est-ce qu’on peut conclure que la contribution de la Sodec augmente?
Marie Brazeau
Notre budget est resté sensiblement le même, mais le nombre de projets acceptés diminue un peu.
Alain Rondeau
Moi qui suis à l’admissibilité, la demande est relativement stable mais encore là, nous ne sommes pas les déclencheurs, ça prend un distributeur et les gens ont du mal à trouver un distributeur.
Micheline Pépin
Directrice des programmes documentaire et gestion des fonds (Télé-Québec)
On est un diffuseur, on déclenche, mais on n’a pas plus d’argent. Il y a une augmentation des devis dans les projets qu’on reçoit, mais nous, on n’a pas plus de budget.
Catherine Loumède
Les budgets des documentaires ont augmenté mais pas ceux de la Sodec.
Isabelle Sylvestre
Documentariste, France
J’ai des projets de co-production, mais les liens et les ponts se font très difficilement. Pourquoi c’est si difficile de mettre sur pied des projets? Y a t-il des aides aux réalisateurs? Y a t-il une vraie volonté?
Marie Brazeau
La Sodec accompagne les producteurs intéressés. C’est difficile d’aller chercher les licences, il faut que ça rentre dans les créneaux des diffuseurs pour intéresser le public des deux côtés.
Tous les projets de co-production majoritaires, minoritaires ou autres, sont accueillis dans le même bassin, mais la SODEC réserve un montant pour la co-production, un montant moindre en complément de financement.
La SODEC exige aussi que 30% du financement étranger soit assuré, car elle ne veut pas être déclencheur.