Mémoire déposé au Groupe de travail chargé de l’examen de Télé-Québec
Note: L’Observatoire du documentaire souhaite présenter ce mémoire lors des audiences publiques que le Groupe de travail tiendra au cours de cette année.
L’OBSERVATOIRE DU DOCUMENTAIRE se joint aux nombreuses voix qui clament haut et fort l’importance de garder, présente et vivante, TÉLÉ-QUÉBEC. L’urgence d’accorder à notre télévision publique les moyens de jouer son rôle unique préoccupe au plus haut point les membres de l’Observatoire. Parce que Télé-Québec est la seule antenne distincte de la société québécoise, cette mission doit être menée d’une manière encore plus conséquente et efficace.
Une part de marché enviable
Au tableau mondial de la télévision éducative et culturelle, la part de marché de Télé-Québec (3 p. 100) est enviable. Le prestigieux réseau américain PBS, par exemple, n’atteint que 2 p. 100 de l’auditoire. L’Observatoire salue la qualité soutenue de la programmation de Télé-Québec à travers la dernière décennie, tandis que se multipliaient les coupures budgétaires d’une part et les nouvelles chaînes de l’autre.
Une niche unique
Un constat s’impose: Télé-Québec demeure indispensable malgré la prolifération des chaînes spécialisées francophones. Les programmations concurrentes ne font que renforcer la place absolument unique et incontournable que Télé-Québec occupe dans les visées culturelles et éducatives du Québec, une société à la fois ouverte sur le monde et attentive à sa propre évolution. Télé-Québec, encore et toujours, est une télévision engagée qui partage les responsabilités de la société qui la finance et qu’elle dessert. L’Observatoire est d’avis que son impact sur la collectivité ne doit pas être assujetti au barème des cotes d’écoute mais à celui de la réflexion sociale.
Même comparée aux autres télévisions publiques, Télé-Québec reste, dans le sens le plus positif du terme, une «autre télévision». On la regarde, parce qu’elle prend les devants, qu’elle défriche, qu’elle ose, qu’elle explore… C’est une télévision qui influence les vents de changement. Elle remplit une fonction parallèle, complémentaire à l’information et au divertissement qui constituent la base de toutes les grilles des diffuseurs.
Une alliance avec le documentaire pour mieux comprendre le monde
Une différence majeure, entre autres, réside dans la case régulière qu’elle réserve depuis longtemps, à heure de grande écoute, au long métrage documentaire. Télé-Québec se place ainsi à l’avant-garde d’une tendance qui gagne maintenant le monde. Télé-Québec a favorisé, de 1999 à 2004, la production de 460 œuvres documentaires originales québécoises (uniques, de séries ou de collections); cette initiative s’inscrit dans la poursuite d’un idéal commun que partagent les créateurs, les producteurs et le diffuseur. Vu l’engouement de plus en plus prononcé des auditoires nord-américain et européen pour ce genre d’œuvres, l’alliance s’avère vraiment prometteuse. Nous croyons depuis longtemps que le documentaire constitue une tendance forte de l’avenir de la télévision; il est indéniable, dans le même souffle d’authenticité, qu’il représente l’avenir de Télé-Québec.
Pour l’Observatoire, le rôle spécifique de Télé-Québec, en tant que télédiffuseur public, n’a jamais été aussi clair. La prise de parole des documentaristes, leur regard profond sur la société, ainsi que la diversité des sujets qu’ils abordent, sans oublier la rigueur de leur démarche, donne une vigueur exceptionnelle à la programmation de Télé-Québec. Ce diffuseur n’a pas besoin d’un téléjournal pour garder le monde dans sa mire. Les points de vue des auteurs aident à décoder la société moderne; leurs regards sur les arts et la culture nous permettent d’apprivoiser l’univers de la création. Leur contribution construit le patrimoine culturel du Québec.
Les documentaristes et la télévision à mandat éducatif et culturel se vouent avec la même passion à l’exploration des enjeux socio-culturels de l’heure et militent, par conséquent, pour les mêmes objectifs. Les préoccupations du milieu documentaire, conjuguées aux menaces qui planent sur Télé-Québec dans le paysage télévisuel, vont bien au-delà des considérations financières, pourtant aiguës. Plus que jamais, il faut préserver la place fondamentale du documentaire dans la défense de la démocratie, de la tolérance et de l’ouverture sur le monde.
Pour une portée accrue des œuvres documentaires
La diffusion substantielle qu’accorde Télé-Québec au documentaire confère à la télévision publique un rôle de détecteur et d’éclaireur dont elle ne pourrait se réclamer autrement. Ce rôle, le diffuseur pourrait l’accentuer et l’endosser avec plus de dynamisme et de cohérence.
L’Observatoire souhaite que le documentaire à Télé-Québec, cet outil d’intervention et de communication extraordinaire, serve à construire une programmation plus conséquente. Chaque documentaire est porteur de discussions, de débats, de questionnements, de nouveaux regards, sur quantité de réalités. Chaque documentaire, par exemple, pourrait être précédé d’une entrevue avec son auteur et suivi d’une réflexion-discussion. Des émissions satellites (tribunes, débats, «making-of», etc.) pourraient s’y greffer, en décupler l’impact et devenir des rendez-vous tout aussi incontournables. Télé-Québec pourrait, dans certains cas, porter le débat sur la place publique, créer l’événement et participer à la diffusion du documentaire en salle. L’enrobage (autopromotion, etc.) de chaque diffusion devrait faire l’objet d’une attention toute spéciale pour en maximiser la portée. Le retour sur les investissements humains et financiers serait immédiat.
Un témoin remarquable des réalités régionales
Le lien étroit que Télé-Québec entretient avec la réalité régionale donne à son rayonnement une dimension additionnelle. Ce lien représente en outre le coeur d’un réseau de diffusion et d’animation essentiel qui n’a pas été, à ce jour, suffisamment et adéquatement exploité. Télé-Québec est une télévision qui a véritablement, grâce au documentaire, des antennes dans tous les milieux.
La qualité et le rayonnement ont un prix
L’Observatoire constate que, dans le contexte global du financement de la production télévisuelle, toute diminution des budgets de programmation de Télé-Québec réduit sa capacité à exercer son rôle unique et essentiel auprès des créateurs et du public. Par exemple, le Fonds canadien de télévision (FCT) octroie une enveloppe spécifique à chaque diffuseur, dont 45 p. 100 sont basés sur l’accès historique. Si les budgets de Télé-Québec fondent, l’enveloppe que lui réservera le FCT fondra, elle aussi. Il en va de même pour d’autres investissements fédéraux et provinciaux, notamment le crédit d’impôt.
Il faut par ailleurs prendre en considération le fait que 30 p. 100 de l’enveloppe attribuée par le FCT dépend des cotes d’écoute. Malgré toute la volonté que pourrait manifester la direction de Télé-Québec de maintenir une qualité de programmation, une réduction des budgets risque, à plus ou moins long terme, de diminuer non seulement la portée et la popularité des émissions inscrites à la grille, mais aussi leur substance. Rappelons que la qualité et le rayonnement ont un prix.
Un appui renouvelé
L’OBSERVATOIRE encourage TÉLÉ-QUÉBEC à continuer, toujours, d’oser et d’innover. Il demande au Gouvernement d’accorder à la télévision publique les fonds et la latitude nécessaires pour maintenir sa force de frappe, pour continuer de diffuser des voix différentes, des voix nouvelles, des voix visionnaires.
TÉLÉ-QUÉBEC
EST UN ESPACE CITOYEN ET UN LIEU DE DIFFUSION DE LA CRÉATION ESSENTIELS
QU’IL FAUT SOUTENIR ET DÉVELOPPER.