Texte Fondateur – Contexte et problématique

Au moment où le documentaire passe d’un mode de production de type artisanal à un système de production de masse de type industriel, l’existence même du documentaire d’auteur est mise en cause.

En effet, ce changement majeur entraîne des conséquences inquiétantes pour le maintien de la liberté d’expression et de la création artistique:

  • À une augmentation phénoménale de la demande de documentaires, due surtout à l’arrivée des chaînes spécialisées, n’a pas correspondu une augmentation des fonds équivalente, loin de là; et ainsi, le coût moyen du documentaire a considérablement diminué en dix ans (35% au Canada et 22% au Québec).
  • Les télédiffuseurs contrôlent le financement du documentaire, prennent peu de risque, favorisent les séries (pour fidéliser les spectateurs) et exigent un format standard pour les grilles télévisuelles dont un pourcentage de temps de plus en plus important est consacré aux messages publicitaires;
  • La multiplication et la diversité des sources de financement maintenant nécessaires au montage financier d’un film, leurs exigences bureaucratiques et leur manque de souplesse fragilisent et écrasent les petites maisons de production qui croulent sous les formalités administratives, les délais inflexibles et le besoin de financement intérimaire, leur laissant peu de temps et d’énergie à consacrer au film lui-même.

Ces conditions ont forcément des répercussions négatives: On assiste à une diminution de la qualité des oeuvres (le montage en souffre particulièrement), une réduction du nombre et de la diversité des œuvres (y compris le cas particulier du contenu canadien), une fragilisation des structures de production, une perte importante de liberté, d’autonomie et de temps de réflexion des cinéastes [selon le document La Production documentaire au Québec et au Canada, phase 2, Kirwan Cox, 2002, «un bon nombre de répondants confient qu’ils travaillent plus qu’il y a cinq ans, mais qu’ils gagnent moins et font des films de moindre qualité à plus petits budgets.»]. Tout cela met en danger l’existence même du documentaire d’auteur.